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Catherine Clarisse, 2004, Cuisine, recettes d’architecture, Paris, Editions de l’imprimeur, collection Tranches de villes, 250 p.


Résumé :

Ce livre est le fruit d’un travail de recherche sur l’évolution de la cuisine dans l’architecture.
La transformation de la cuisine au XXème siècle avec comme dicton « Pour gagner du temps, il faut perdre de l’espace » a incité Catherine Clarisse à s’intéresser à ce sujet. Elle présentera l’étude de différentes cuisines pour comprendre cette évolution de la cuisine et l’objectif de leur créateur.
Avant tout, elle nous fait part de ses intentions et explique les différentes étapes qui l’ont amenées à proposer une recherche sur ce sujet.
Tout d’abord, c’est la cuisine de l’ensemble d’habitations de la rue de Meaux, à Paris, projet de Renzo Piano Building Workshop, qui est à l’origine du livre. Ayant participé à ce projet, elle nous explique brièvement le programme.
« Comment les architectes dessinent les cuisines : l’équipe d’architectes, le maître d’ouvrage et la cuisine »
Avec les contraintes précises du cahier des charges, ils ont tout de même réussi à répondre au programme. Cependant, les cuisines furent quelque peu mises de côté : « Les tâches domestiques étant « contenues » dans ces boîtes de 60x60x85cm, il suffisait sur le plan d’indiquer l’emplacement de l’évier, de la hotte et des prises électriques. ». Les appartements furent munis de grands séjours aux dépens de petites cuisines.
Dans un même temps, elle reprenait ses études et décida d’effectuer des recherches sur la place de la femme dans l’architecture puis se recentra sur l’étude de la cuisine de Francfort de Margarete Schütte-Lihotzky de 1927.
Malgré un début difficile car son sujet lui semblait être une simple étude fonctionnelle et un sujet « ni très noble, ni très valorisant », elle essaya de le contourner et de s’intéresser aux « femmes architectes ». Elle s’interrogea aussi sur la place que les architectes du Mouvement Moderne avaient attribuée aux femmes dans les espaces qu’ils avaient conçus. Elle se rendit compte qu’ils créèrent l’image de la ménagère souriante dans sa cuisine.
Ces découvertes remirent en cause sa vision du Mouvement Moderne en architecture. Le plan libre réduit la cuisine et l’espace se resserre autour de la femme. Ceci l’incita donc à consacrer son mémoire universitaire aux cuisines de la période du Mouvement Moderne en architecture.
Cette période a voulu créer une cuisine « pratique », « fonctionnelle », « rationnelle » et donc petite. Elle fit disparaître la table et ses chaises puis la fenêtre. Elle cite comme exemple la cuisine de l’unité d’habitation de Marseille de Le Corbusier.
« Aujourd’hui, cuisiner est à la mode » et la cuisine est de nouveau dans les magazines ou les émissions de télévision ; elle est plutôt vaste et surtout « photogénique ». Les habitants demandent de la convivialité dans ces espaces.
Une dernière chose incita Catherine Clarisse à s’intéresser à la place de la cuisine dans l’habitation : « l’enseignement de l’architecture ». Participant à un enseignement à l’école d’architecture de Clermont, elle découvrit un très bon projet d’aménagement de l’îlot Rabanese d’une des étudiantes. Cependant, elle fut surprise par la présence d’une minuscule cuisine-bar au fond d’un vaste séjour dans le plan d’un appartement avec trois chambres. L’étudiante eut un « discours d’architecte des années 1950 ». Ce livre s’adresse donc aussi à tous les étudiants en architecture.
Ce livre présente « la découverte de ces cuisines qui l’ont passionnée et qui ont modifié son regard ». Elle essaie d’apporter une nouvelle approche de l’espace qui tente d’harmoniser comportements et cadres de vie.


Points particuliers :

« Comment les architectes dessinent les cuisines : l’équipe d’architectes, le maître d’ouvrage et la cuisine » (p14-15)
Elle énonce une vérité qui me semble décrit tout à fait la frustration de beaucoup d’architectes devant un cahier des charges: « Il peut sembler que la forme de l’habitation tende à n’être plus que la résultante de l’application de tous ces règlements, normes, standards, impératifs constructifs, etc., qui font, d’une certaine manière, la matière de l’architecture actuelle. »

« Et Corbu « créa la femme »… » (p18)
« La femme sera heureuse si on mari est heureux. Le sourire des femmes est le don des dieux. Alors faîtes donc de votre cuisine le lieu du sourire féminin ! Et que ce sourire rayonne de la cuisine sur l’homme et les enfants présents autour de ce sourire. Il fallait y penser. Bien sûr ! » Le Corbusier, dans un document préparatoire au CIAM.

« Etre une femme libérée, ce n’est pas si facile » (p19)
« Le fameux plan libre des architectes, lorsqu’il s’agit de cuisine, n’autorise pas une grande liberté de mouvement : au contraire, l’espace se resserre autour de la ménagère pour lui éviter de faire trop de mouvements. Pourrait-on aller jusqu’à évoquer une « cuisine-corset » ? »

« La légende de la petite « cuisine pratique » : pour gagner du temps il faut perdre de l’espace » (p19 à 23)
« Les revues d’architecture des années 1920 et 1950 fourmillent de présentations de cuisines « pratiques », « fonctionnelles », « rationnelles ». »
« Cette légende, qui aboutit à l’image de la ménagère souriante derrière son passe-plat, nous avons du mal à la remettre en question. Se pencher sur l’histoire de cette période peut nous y aider. »

« L’enseignement de l’architecture » (p24-25)
« Il faut faire attention à la petite ménagère à la blouse de nylon et au sourire exquis, car dans les projets d’étudiant(e)s, elle revient très facilement derrière un passe-plat dans une kitchenette. »
« Une solution envisageable pour la cuisine semble être l’agrandissement et la possibilité de s’y asseoir pour retrouver convivialité et plaisir. Mais cela ne peut se faire sans une évolution des mentalités. »


Commentaires personnels :

Ce livre est intéressant car il permet de se remettre en question. En effet, il me semble que nous avons tendance à oublier que les modes de vie évoluent. Nous prenons exemple sur de grands architectes en pensant que cela ne pourra être que bien puisque ça a fonctionné mais nous avons tendance à oublier le contexte historique, social… Ce livre nous rappelle qu’il faut tenir compte des modes de vie actuels mais aussi du caractère de chacun. Le maître d’ouvrage lorsque c’est un privé est très important dans le projet car il faut répondre à ses envies et essayer de le guider suivant ses habitudes, le conseiller pour que sa vie dans son nouveau « chez-soi » devienne plus facile, pratique mais reste « naturelle ».
La lecture de l’introduction et de ses « intentions » m’a donné envie de lire le livre entièrement.

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